RETOUR SUR LES CONFÉRENCES SCIENTIFIQUES ET TECHNIQUES
A3TS 2012 : LES INVESTISSEMENTS EN TRAITEMENT DES MATERIAUX.
Selon l’économiste allemand Helmut Schmidt, l’investissement d’aujourd’hui concerne les profits de demain et les emplois d’après demain. C’est donc un sujet qui mérite une grande attention, d’autant plus que le métier du traitement des matériaux doit répondre à une demande constante d’amélioration des performances des produits tout en assurant un parfait respect de l’environnement. Cette évolution du paysage industriel conduit à une grande diversité de solutions et d’opportunités dans un contexte ou les erreurs stratégiques ne sont pas permises. A3TS 2012 a voulu offrir un moment de réflexion sur ce sujet en profitant du symbole de la ville de Grenoble, vallée importante de R et D d’où le regard se tourne naturellement vers les hauteurs.
Dans le domaine des investissements propres à la mise en oeuvre des matériaux, PSA et EFD ont dressé un historique de la technique d’induction dans le groupe PSA et indiqué leur réflexion sur le futur de ces traitements dans l’automobile. Sur ce même thème de l’induction, SAET GROUP a montré tout l’intérêt de cette technique pour le traitement des roulements ; G. Auclair d’ASCOMETAL a décrit l’expérience d’un gros investissement en Thixoforgeage, du concept à l’industrialisation. Ensuite, O. Bonnet de l’IRT M2P et A. Viola de SAFRAN ont montré l’énorme potentiel de recherche et de mise au point des différentes plateformes qui allaient prochainement être mises à la disposition des industriels du secteur de la mise en oeuvre et du traitement des matériaux et qui constitueront une aide importante à la décision d’investissement. C’est ensuite le thème de l’investissement dans les méthodes qualité et de fabrication qui a été exploré avec un exemple réussi d’application des statistiques à la maitrise des déformations présenté par D. Gérardin de CATERPILAR ; une présentation par le CETIM (au nom d’un groupe de travail ou sont représentés les constructeurs, grands donneurs d’ordre de l’industrie automobile et des praticiens du traitement thermique) d’un nouveau référentiel permettant de maitriser et d’améliorer le processus de traitement thermique ; un exposé de THYSSENKRUPP indiquant les règles à respecter au niveau des matériaux, pour assurer l’étanchéité de constructions travaillant sous vide. A signaler dans cette session, la démarche particulièrement intéressante développée au CETIM par A. FLEURENTIN pour optimiser la durée de vie d’un acier réfractaire utilisé dans les équipements de fours et qui a reçu le prix de l’innovation A3TS.
L’investissement, c’est peut-être aussi, dans le futur, prendre en compte les exigences accrues de propreté de surface. L’une des sessions du congrès a été consacrée à cet aspect. J.M. BARZYK de PSA a présenté le problème dans son ensemble pour l’industrie automobile : effets de la non propreté, mesure exigences et traitement du problème chez PSA. J. RIBEYRON du CETIM a décrit l’approche proposée pour la prise en compte de la propreté dans les industries mécaniques. AMSONIC avec sa maîtrise du nettoyage par ultrasons et CLEANPART spécialiste de la propreté dans le domaine des semi-conducteurs ont fait part de leur expérience sur le sujet.
Enfin et dans la tradition des congrès de l’A3TS, des nouveautés de la profession ont été présentées. Ce sont, par HEF une réflexion générale sur l’application des DLC pour diminuer les émissions de CO2 au travers de l’amélioration des frottements ; par THERMI-LYON, la présentation de revêtement de revêtement DLC à haute adhérence ; un point, par CHEMETAL sur l’évolution du traitement de surface avant peinture dans l’industrie automobile ; le développement, par VALLOUREC, de nouvelles nuances d’acier à haute ténacité pour application en forage ; et la caractérisation par BODYCOTE des propriétés mécaniques et tribologiques d’élastomères traités par implantation ionique.
LE FORUM
Cette année encore, le FORUM a permis aux exposants de présenter, sous forme d’exposés technico-commerciaux, leurs produits et procédés.
Le Forum A3TS a été ouvert, le mercredi 6 juillet après-midi par une présentation du Pôle VIAMECA «MANUTECH-SISE, le label ingénierie de surfaces» par P. Kapsa.
5 exposés technico-commerciaux ont été présentés, entrecoupés par des exposés sur les activités de l’association :
- New plug-and-play installation technology by SECO/WARWICK for surface hardening of stainless steel in lean production processes (expanite). T. Strabo (SECO / WARWICK).
- Utilisation des textiles haute température (1250°C) dans le traitement thermique. C. Tranchat (HILTEX).
Présentation des actions de formation A3TS réalisées pour NADCAP, AMS 2750 et CQI9.
- Cleansurf appliqué aux traitements par lits fluidisés. J.P. Chobaut (CM2T).
- Nuances pré-traitées au chrome-manganèse-molybdène. L. Debraix (THYSSENKRUPP).
Présentation des activités des commissions A3TS.
- Les nouvelles solutions CLEANBLAST pour la préparation de surfaces avant peinture. A.M. Pubill Melsio (AIR LIQUIDE).
Le Forum s’est poursuivi le jeudi 7 juillet avec les interventions de :
- Lam Plan vous propose sa nouvelle gamme de machines métallographie. J.M. Bouchacourt (LAMPLAN).
- Induction dans le traitement des roulements.
- Le renouveau grâce aux techniques actuelles. F. Marquis (SAET SpA).
- Multi-purpose LPC+LPN+HPGQ 25 bar N2/He single chamber vacuum furnaces. P. Grygorcewicz (SECO/WARWICK).
- PREVAC – Precision and vacuum technology. J. Kowalska (PREVAC).
- Nouveaux matériaux pour cémentation basse pression & montages adaptés. C. Pascal (AFE CRONITE).
PRIX DE L’INNOVATION 2012
Cette année, lors de la Soirée A3TS, le Prix de l’Innovation a été décerné au CETIM !
Le Jury a récompensé le CETIM avec les critères de choix suivants :
- Une démarche exemplaire, combinant l’identification d’un enjeu économique important pour la profession, une participation de la profession pour l’acquisition de données industrielles, la recherche d’une compréhension des phénomènes en jeu.
- Au final, et même si la solution industrielle n’est pas encore disponible, le projet débouche sur l’espoir de disposer rapidement d’une solution industrielle.
- Le problème traité est générique, commun à l’ensemble de la profession.
- Il nous a semblé intéressant de reconnaître un projet qui s’attachait aux pratiques industrielles du traitement thermique, renouant par là avec un des fondamentaux de l’association : l’amélioration de la performance – au sens large – des traitements thermiques par une démarche incluant la mise en commun des problématiques et la recherche d’une solution mutualisée qui puisse bénéficier à l’ensemble de la profession.
A. Fleurentin présente ci-dessous la synthèse des travaux réalisés :
Améliorer les performances des fours de traitements thermiques à tapis par le biais de la durée de vie de leurs aciers réfractaires : tel est l’objet de l’étude menée depuis 6 ans avec un groupe de travail réunissant une dizaine d’entreprises des commissions CETIM « R & D fixations » et « Traitements thermiques et traitements de surface voie sèche » et le Laboratoire Vellave sur l’élaboration et l’étude des matériaux. Ces fours sont utilisés très souvent sous atmosphère protectrice, avec un potentiel carbone fixé en fonction de l’acier traité, ou carburante où le potentiel carbone est traditionnellement proche de 0.75%. Le principal mode de dégradation des tapis, en 330Cb tréfilé, est lié à la fragilisation et l’amincissement de ses spires (Cf Figure 1). Ce phénomène est induit par à une carburation et une déchromisation importante de la matrice austénitique.

Figure 1 : Observation de l’évolution de l’endommagement d’un tapis de four.
Pour lutter contre la corrosion à chaud sous atmosphère carburante, il est impératif de former une couche parfaitement protectrice, continue, stable dans le temps et adhérente. Dans les aciers austénitiques, formeurs de chromine, le silicium, tout comme l’aluminium, est un élément dont le comportement doit être considéré avec attention lors de l’oxydation à haute température. Puisque sous une atmosphère à base d’argon, préoxydé à 900°C, il est possible au bout de 144h de former une couche de silice (Cf. figure 2) mixte beaucoup plus protectrice, continue et adhérente que la chromine classiquement formée sur cette nuance. La cartographie X du silicium met correctement en évidence l’effet «cramponnage» de la couche dans la matrice. En effet, un tapis protégé par cet oxyde a été utilisé en production pendant plus de 2,5 ans sans connaître une carburation catastrophique puisque la structure métallurgique de la matrice était encore granulaire.

Figure 2 : Micrographie du fil de 330Cb oxydé à 900°C sous Ar pendant 144h.
Coupe (x 5000) et cartographie X des éléments.
Le groupe de travail continue ses investigations sur le sujet afin de réduire le temps de pré-oxydation pour être en phase avec les contraintes industrielles. Dans les prochains mois, il sera probablement envisageable de réaliser cette couche sous moins de 48h…
LA SOIRÉE A3TS
La soirée A3TS s’est déroulée le jeudi 7 juillet au Fort de la Bastille.
Inscrit à l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques, l’impressionnante construction militaire que l’on découvre de nos jours, a été édifiée entre 1823 et 1848. Du côté de la ville, la Bastille déroule ses remparts, ses casemates et ses escaliers sur près de 300 mètres de dénivelé.
La montée des convives par le Téléphérique se fit avec une coupe de champagne à la main ! Le « soldat Barnabé » accueillit les 190 invités en leur présentant le site et son histoire ! Avec une vue magnifique sur Grenoble et ses montagnes, le dîner fut sympathique et la descente par le Téléphérique impressionnante sous le tonnerre et les éclairs !
LES VISITES D’USINES
Comme chaque année, des visites de sites industriels sont proposées le vendredi matin aux congressistes, cette année 4 sites ont été visités :
Site de production de SCHNEIDER ELECTRIC – Moirans (38) – Par Francis Bourgeois
Le groupe SCHNEIDER Electric compte dans le monde environ 120 sociétés qui emploient 55000 personnes pour de nombreuses fabrications de matériels qui correspondent aux besoins des marchés de l’alimentation, de la protection et de la régulation pour l’approvisionnement en énergie électrique.
SCHNEIDER Electric à Moirans est situé à 45 Km au nord ouest de Grenoble en direction de Lyon. Cette unité du groupe Schneider, regroupant environ 340 personnes, réalise des sous ensembles et les assemble pour la fabrication de disjoncteurs électriques de moyennes et hautes puissances. Ces appareils sont généralement commercialisés pour des entreprises ou des collectivités qui peuvent être alimentés jusqu’à 6000 Kw de puissance électrique. Cette unité fonctionne en flux tendus au niveau de ses approvisionnements car de nombreux composants sont fabriqués en sous- traitance, ce qui implique une gestion des stocks rigoureuse et complexe en mode KANBAN avec SAP.
Les matériaux utilisés sont principalement le cuivre, l’aluminium, les polyesters pour l’injection, les plastiques et la visserie d’assemblage.
Les ateliers sont organisés en îlots de fabrications, de contrôles et d’assemblages finaux généralement réalisés par des femmes.
Au niveau des fabrications, les principales opérations sont le découpage des pièces en cuivre par cisaillage à sec, le soudage par résistance des contacteurs frittés ou HF pour d’autres composants (style brasage) et la fabrication de pièces en polyesters injectés sous vide dans des moules. Pratiquement toutes les fabrications sont automatisées en îlots sauf quelques pièces complexes et l’assemblage final pour lesquels le choix de main-d’oeuvre qualifiée, généralement féminine, est fait.
Schneider électric peut dans ce site fabriquer pour certaines références jusqu’à 350 disjoncteurs par jours.
ESFR (European Synchrotron Radiation Facility). Visite du Synchrotron – Grenoble (38) – Par Béatrice Becherini
Institut de recherche pluridisciplinaire, l’ESRF (European synchrotron radiation facility) situé à Grenoble, se penche sur l’étude de la matière par rayons X. Et cela, dans des domaines variés comme les sciences des matériaux, l’imagerie médicale, la chimie, la photosynthèse, la paléoanthropologie … Les rayons X sont produits par des électrons de très haute énergie circulant dans un accélérateur, appelé anneau de stockage. La lumière synchrotron est produite lorsque les électrons de haute énergie, circulant dans l’anneau de stockage, sont déviés par des champs magnétiques. Le premier faisceau de lumière synchrotron a été observé en 1947. Le premier faisceau d’électrons dans l’anneau de stockage (de 844 mètres de circonférence) de l’ESRF a vu le jour en 1992.
L’ESRF accueille chaque année plus de 6 000 visites scientifiques. Les chercheurs viennent du monde entier : 27,5 % de français, 25,5 % d’allemands, 15 % d’italiens, 14 % d’anglais … Plus de 1 800 publications par an en sont issues.
Majoritairement dédié à la recherche publique, l’ESRF est également ouvert aux industriels.
Inauguré en 1994, l’ESRF comporte 42 lignes de lumière* dont la construction s’est achevée en 1998. Vingt ans plus tard, un programme d’extension est signé pour de nouvelles lignes de lumière qui permettront d’utiliser des nanofaisceaux.
* Elles fonctionnent 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7.
À noter :
50 synchrotrons se répartissent dans le monde. Le premier des trois plus grands est celui de Grenoble (énergie constante de 6 GeV*), le second est situé aux États-Unis (7 GeV) et le troisième au Japon (8 GeV).
* GeV : milliard d’électrons volt.
FEDERAL MOGUL SINTERTECH – Le Pont de Claix (38) – Par Claude Maillard-Salin et Jean-Paul Betend
Un groupe d’une dizaine de congressistes a été reçu le 8 juin sur le site de FEDERAL MOGUL SINTERTECH de Pont de Claix par M. Vincent BONNEFOY, responsable développement et Mme Kathleen LEMARCHAND, métallurgiste. Le site produit des pièces frittées, principalement des moyeux de synchro pour l’automobile.
Federal Mogul produit des pièces frittées pour l’industrie de l’automobile sur trois sites en France :
- Pont de Claix, pour principalement des pièces de boites de vitesse,
- Veurey Voroize, pour des pièces de motorisation,
- Oloron Ste Marie, pour des petites pièces diverses.
100 à 150 personnes sont employées sur chacun de ces sites, le chiffre d’affaire global est de l’ordre de 55 millions d’Euros.
Environs 11 000 à 12 000 tonnes de poudres sont manipulées par an.
Les clients de Federal Mogul sont les constructeurs automobile ou leurs fournisseurs de rang 1 ou 2.
La fabrication d’une pièce frittée nécessite la maîtrise des étapes suivantes :
- Mélange des poudres : matériau de base, éléments d’addition, lubrifiant,
- Mise en forme : répartition de la poudre selon la variation de l‘épaisseur et les différents niveaux de la pièce,
- Frittage,
- Finition.
La visite a été organisée en suivant ce processus de production.
La matière première est de la poudre très fine de divers matériaux métalliques (principalement des aciers), la poudre est livrée en sacs, quand on la touche c’est très doux comme de la farine, les grains ne sont pas sphériques (ils ne pourraient pas s’agglomérer lors du compactage), on a l’impression d’un milieu quasi continu et pourtant il y a en volume plus d’air que de poudre dans les sacs (la densité est de l’ordre de 3 à 4 contre 7,85 pour l’acier).
Les poudres sont tout d’abord mélangées pour obtenir l’alliage souhaité, elles sont ensuite mises sur les presses pour être compactées. Les presses sont de puissance beaucoup plus faible que des presses de forge (1000daN maxi).
Leur course se démultiplie sur plusieurs vérins intermédiaires : chaque hauteur de pièce nécessitant une hauteur de poudre spécifique pour que la densité soit homogène sur la pièce. La répartition de la poudre dans l’outillage et la répartition des pressions selon les épaisseurs de la pièce sont le coeur de savoir-faire de Federal Mogul. Le compactage augmente la température jusque de l’ordre de 100°C. Après compactage, les pièces sont solides, on peut les prendre, mais elles sont fragiles : on peut les casser.
A ce stade une pièce écartée est recyclable (redevient poudre …)
Elles sont manipulées par des robots, un premier parachèvement est réalisé : dépoussièrage, puis les pièces sont disposées sur des tapis pour être frittées, sous atmosphère protectrice, à des températures de 1120 à 1200°C suivant les fours.
Les fours sont multi-zones pour permettre l’enlèvement du liant puis pour réaliser le frittage sous un mélange d’azote, hydrogène et méthane.
L’atelier de Pont de Claix ne dispose pas de traitement thermique mais peut pratiquer le refroidissement forcé à l’air en sortie four.
A la sortie du four, plus question de casser les pièces, elles ont leur caractéristiques mécaniques définitives (hors traitement thermique complémentaire, induction par exemple). Des opérations complémentaires peuvent être pratiquées : ébavurage, perçage, calibrage (les pièces peuvent se déformer durant la cuisson), surfaçage (la cote épaisseur n’est pas facile à obtenir directement en frittage) …
Les pièces restant poreuses, les fluides utilisés pour l’usinage ou le calibrage posent problème pour d’éventuels traitements de surface ultérieurs … De même, les gammes de traitements thermiques réalisés sur pièces frittées sont spécifiques mais les paramètres de frittage et de traitement sont maitrisés pour l’obtention des caractéristiques recherchées.
Les matières premières sont coûteuses (de l’ordre de 3 à 4 €/kg).
L’intérêt du fritté est de réduire considérablement les opérations d’usinage.
Un moyeu de synchro revient à 3 à 4 euros environ.
Etant donné la complexité des outillages de compactage, cette technologie parait réservée aux grandes séries.
CATERPILLAR France – Grenoble (38) – Visite de l’atelier Mécanique – Traitement Thermique.
Une dizaine de congressistes ont principalement visité l’atelier Mécanique Traitement Thermique guidés par Denis Gérardin.